Immolations


Immolation par le feu (jauhar) des femmes Rajput durant le siège de Chittorgarh (Rajasthan) en 1568

Parler de mode serait cynique. Et pourtant… En ces temps de mondialisation culturelle et de diffusion de pratiques, nouvelles ou non, à l’échelle du globe, les immolations par le feu apparaissent comme une nouvelle « tendance » qui, au rayon du macabre politique, rejoint les attentats-suicide, sans se confondre avec eux toutefois.
Lorsque Mohamed Bouazizi tente de se suicider par le feu le 17 décembre 2010, dans une obscure localité du sud tunisien, il est certainement loin de se douter que son acte, pour désespéré qu’il soit, va faire des émules. Au point d’engendrer un mode de protestation aussi terrible que spectaculaire.
Il mourra deux semaines plus tard de la suite de ses blessures. Entre-temps, la Tunisie aura commencé à… s’embraser. L’image est donc si forte qu’elle a fait le tour du monde. Et depuis, malheureusement, d’autres ont suivi son chemin, jusqu’aux Tibétains (mais qui imite qui?) qui reprennent une pratique de protestation apparue au temps de la guerre du Vietnam, mais en Inde cette fois, face à la Chine. Certaines ONG cartographient les immolations au Tibet et en Chine:

Carte localisant les auto-immolations en Chine et au Tibet.
Un exilé tibétain de 27 ans s’immole par le feu à New Delhi peu avant une visite officielle du président chinois Hu Jintao en Inde, le 26 mars dernier.

On immole une victime, dans un sacrifice, et pas nécessairement par le feu. Dans le cas de ces auto-immolations, il s’agit d’une pratique héritée du bouddhisme mahayana. L’arrière-plan spirituel est donc présent, aussi surprenant que cela puisse paraître.

On peut aussi songer aux  veuves qui se jettent dans le brasier de leur mari en Inde.

Aujourd’hui, l’auto-immolation prend un tour nettement plus politique. Elle apparaît comme un acte à la fois de désespoir et une forme de protestation sous forme d’accusation. En France, deux cas récents ont eu lieu: une enseignante, en octobre 2011, à Béziers, et un chômeur en fin de droit, à Nantes, le 13 février dernier, suivi d’autres tentatives encore.

On peut se demander comment une pratique au départ plutôt minoritaire et marquée par le bouddhisme et l’hindouisme a pu se répandre dans des contextes si différents. Leur trait commun, c’est une forme de suicide spectaculaire. Mais ensuite, il semble que cela donne des idées à d’autres personnes en rupture avec ce monde, pour des raisons politiques, religieuses, ou personnelles.

On peut enfin s’interroger sur les motivations profondes de toutes ces personnes. Mais il s’agit, dans tous les cas, d’un signe inquiétant, en train de se mondialiser.


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