Il n’y a plus de saisons…


La vague de froid qui s’est abattue sur la France ces derniers jours a remis le printemps à plus tard. Des scènes un peu surréelles ont surgi sur les écrans, comme ces skieurs à Montmartre:

Voilà pour le côté plaisant. En revanche, pour beaucoup d’autres, du côté de la Normandie, cela a été nettement moins drôle.
On a vu ces files de voitures ensevelies et ces conducteurs furieux d’avoir été pris au piège en rentrant de leur travail, obligés de camper sur place.
A chaque chute de neige inopinée, à chaque épisode de crues importantes, la réaction est la même: c’est le scandale, la révolte contre le froid, l’incurie de l’État, le pas de chance. Mais on ne se demande jamais s’il n’y a pas un problème plus général et plus profond, celui de la fragilité de nos sociétés techniciennes face aux aléas naturels.
Devant les caprices de la nature, beaucoup semblent tentés de mater la nature par des biais encore plus techniques, encore plus sophistiqués, comme si l’ingénierie de la nature était la seule solution.
Pourtant, il y a bien des cas où les énergies mises en branle dépassent de très loin les capacités humaines. Pensons, par exemple, à l’éruption de l’Eyjafjöll en 2010; ce volcan islandais a durablement perturbé les communications aériennes en Europe alors qu’il ne s’agissait que d’une éruption modeste. Qu’en aurait-il été pour une éruption plus grave?

L’Eyjafjallajökull pendant l’éruption de 2010

En vérité, on ne maîtrise pas grand chose du climat, même si les Chinois provoquent les chutes de pluie chez eux depuis des décennies à présent, au point que certaines villes intentent des procès à d’autres villes en estimant qu’on leur avait « volé » des pluies qui leur revenaient…

Depuis Emmanuel Leroy-Ladurie, une histoire de l’environnement s’est peu à peu mise en place, sœur jumelle de la géographie historique, qui a pour tâche immense de comprendre les environnements passés.

L’historien Alain Corbin avait abordé le thème du « temps qu’il fait », comme un exemple d’objet culturellement construit. Les conversations autour de la météo restent encore les plus importantes en quantité. C’est le premier sujet de discussion. Mais les appréciations sur la météo varient grandement d’un pays à un autre.

Un autre exemple: la neige et la glace. Tandis que certains pays (France, Canada) déversent des tonnes de sel sur les routes, d’autres équipent les véhicules et apprennent à leurs concitoyens à conduire sur la neige et la glace, comme en Suède. Cela en dit long sur le rapport avec la nature.

Mais si l’on en revient au présent, on constate assez facilement que cette vulnérabilité est due aux transports: transport de marchandises, puisque le tout camions, en dépit du bon sens, a remplacé tous les autres modes de transport, à commencer par le transport fluvial; et transport de voyageurs, voiture, train, avion, essentiel à cause de la coupure de plus en plus forte entre lieu de résidence et lieu de travail.

Remettre en cause la route ce serait remettre en cause notre « civilisation ». Il n’est que de voir les réactions des automobilistes immobilisés par la neige pour comprendre que remettre en cause leur liberté de déplacement motorisée est tout simplement impensable.

En ces périodes de « développement durable », il est donc encore bien difficile de changer nos habitudes. La voiture reste le mythe et le symbole par excellence de l’ère mécanique, et ce n’est pas près de changer.


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