L’Amazonie à Montélimar, le cauchemar


Le ministre de l’Amazonie française, Arnaud Montebourg

Homme d’affaire de l’année 2012 , le vertueux Jeff Bezos, PDG d’Amazon, mérite-t-il sa breloque décernée, il est vrai, par Fortune ? L’Américain-qui-a-commencé-dans-un-garage est propriétaire de soixante quinze entrepôts dans le monde, dont un à Montélimar dans la très fréquentée vallée du Rhône. S’y est installé comme intérimaire, le journaliste Jean-Baptiste Malet qui travaille dans l’équipe de nuit pendant un mois à Noël 2012.

De son poste de « pickeur », Malet parcourt deux dizaines de kilomètres par jour pour extraire de leur cellule (des bins) ce qu’on appelle ici des « produits culturels » à transmettre à un « packeur » chargé de les emballer. Le tâcheron s’exécute quarante-deux heures par semaine, avec deux pauses journalières de vingt minutes (pas une de plus), interdiction de parler à quiconque et fouille à la sortie du travail. L’entrepôt est grand comme cinq terrains de foot. Un « non lieu », Marc Augé ?

Big Brother surveille son rendement et le moindre geste : où il est, ce qu’il fait, s’il exécute bien ses commandes, prend les trajets les plus courts. Un ordinateur mouline tout ça et calcule la productivité. Stakhanov, réveille-toi !

« Work hard, have fun, make history »

Mais ce n’est pas tout. Vivre en Amazonie, c’est organiser son temps libre afin qu’il soit compatible avec l’ambiance de l’entreprise et sa devise «Work hard, have fun…»  C‘est pour garder le moral dans cet univers glacial du meilleur des mondes drômois. Pendant les pauses, on peut jouer à répondre à des quizz portant sur les séries télévisées. Why, doctor ? « Bezos ne veut pas que l’on arrive la boule au ventre… »

Nos marathoniens vendent du livre nazi, des revues porno et Proust en pléiade. Mais de plus en plus de n’importe quoi : montres, vêtements, accessoires pour auto, réfrigérateurs, hamacs pour chats, parfums pour chiens…

Chaque nouvel entrepôt en France est salué par des Alleluia ! Des emplois, des emplois… Ne regardez pas de quoi il s’agit, les horaires, les subventions publiques, la disparition des librairies indépendantes voire de la Fnac ou Virgin. Qu’en pense notre élégant ministre qui réussit à attirer Amazon sur ses terres bressanes ? « Je ne vais pas botter les fesses de ceux qui créent des emplois. »

Gare aux coups de pied dans les fesses électorales socialistes. Et filons sur Amazon.fr pour nos livres de géographie…

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Pour en savoir plus : J.-B. Malet, Amazonie, Fayard, 2013

 

 

 

 

 


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