Derrière l’Iran, la Perse


Le ballet diplomatique entre l’Iran et les divers pays impliqués dans les négociations sur les installations nucléaires nationales iraniennes tient en haleine une partie de l’opinion internationale, comme si le monde était au bord du gouffre. Israël laisse clairement penser que son intégrité territoriale serait menacée par un Iran nucléarisé. Des échanges diplomatiques très vifs ont lieu.

Affiche du film Persépolis inspiré de la bande dessinée de Marjane Satrapi, 2007

Mais connaît-on vraiment l’Iran? Du côté « occidental » on en reste à des clichés dignes du croque-mitaine, en évoquant l’islamisme comme un repoussoir qui élimine toute velléité de comprendre un pays multi-millénaire. Le livre de Marjane Satrapi, Persépolis, a pourtant œuvré à changer la donne en montrant que la vie en Iran n’était pas non plus si différente de celle des pays occidentaux.

A vrai dire, les parallèles avec la Chine sont nombreux: deux nations très anciennes, berceaux de cultures multi-millénaires toujours vivantes; d’anciennes grandes puissances qui ont dû courber l’échine devant la toute-puissance européenne, mais qui n’ont jamais véritablement été colonisées. Et deux grandes nations humiliées pendant des décennies par les pays occidentaux à cause de leurs ressources et de l’avidité des Européens comme des Étasuniens.

En effet, la Chine après la Guerre de l’Opium n’était plus que l’ombre d’elle-même, et l’Iran soumis aux grandes compagnies pétrolières a connu des périodes de « modernisation » forcée et brutale dont le résultat a été… la révolution islamique de 1979. En Chine, le Parti Communiste a conquis le pouvoir après un long cycle de guerres civiles et d’invasions étrangères qui ont marqué le pays au fer rouge. Et en Iran non plus, on n’oublie pas l’époque où les étrangers faisaient la pluie et le beau temps au détriment de la majorité de la population. Le XXe siècle a été un siècle sombre où la manne pétrolière ressemble davantage à une malédiction, couplée aux stratagèmes de la Guerre froide.

On peut donc à bon droit affirmer que l’Iran, c’est à dire l’ancienne Perse, est en plein rattrapage historique, exactement comme la Chine, et que son but premier est de restaurer sa puissance à l’échelle régionale. Mais de là à dépeindre l’Iran comme un état belliciste et dangereux, il y a plus qu’un pas. On entre ensuite dans le domaine des fantasmes.

L’anti-sionisme officiel de l’Iran ne peut qu’inquiéter Israël, certes, mais c’est la montée en puissance globale de l’Iran qui peut inquiéter l’état hébreu qui a le leadership régional. En revanche, vu de loin, l’Iran apparaît comme un « nouveau pays ancien », basé sur une culture éblouissante et une profondeur historique peu commune. Et l’on peut gager que la plupart des Iraniens, surtout après les affrontements sanglants avec l’Irak, aspirent avant tout à la paix.

Enfin, le nouveau chef de l’Etat, Hassan Rohani, déclarait au mensuel la Revue que si les pays occidentaux avaient bien des atouts, leur culture était essentiellement matérialiste, tandis que l’Iran proposait aussi à ses citoyens une ouverture vers le spirituel. Peut être la différence entre l’Orient et l’Occident gît-elle là?

En une: une miniature tirée de l’un des manuscrits du Shahnameh, l’un des chefs-d’œuvre de la littérature persane.

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