Le monde les a perdus en vol


(Ci-dessus, Matias Perez, le Cubain disparu)

C’est un immigré portugais, Matias Perez, s’envolant de La Havane (Cuba) sur une montgolfière appellée « Ville de Paris », qui a été le premier disparu de l’histoire de l’aviation le 29 juin 1856. Jamais revu. Les deuxième et troisième disparus, Charles Nungesser et François Coli, ont quitté Le Bourget sur L’Oiseau blanc pour New York le 7 mai 1927 sans jamais atterrir (alors que Lindbergh a réussi l’exploit dans le sens inverse quinze jours plus tard.

Comme l’écrit Joëlle Kuntz (1), « l’accident d’un avion a toujours été un choc, mais sa disparition est une offense à la raison technique. Il faut une explication, dût-elle prendre un siècle. Des passionnés cherchent encore ce qui est arrivé au Lockheed Electra 10 E après sa dernière communication radio, le 6 juillet 1937, en plein Pacifique, entre Hawaii et l’Australie. Son pilote, Amelia Earhart, était la coqueluche de l’Amérique, la première femme à avoir traversé l’Atlantique après Lindbergh, en équipage puis en solo; à avoir accumulé des records de vitesse; à avoir piloté un gyroplane. Une femme riche, indépendante et belle, qui prêtait son image à des marques de bagages, de vêtements ou de cigarettes, donnait des conférences et signait des livres. »

Cette « reine du ciel » s’est perdue avec son mécanicien. Cette star a été légendée par Diane Keaton au cinéma. Les recherches ne sont toujours pas terminées, la 24e expédition est en cours.

Le ciel a réclamé un lourd tribut aux humains. J. Kuntz a compté douze disparitions d’avions de lignes entre 1946 et 1964, avec un total de 600 passagers et équipages. Les boites noires parlent désormais comme ce fut le cas, in extremis, pour le Rio-Paris du 31 mai 2009.

« Les avions militaires manquants ne font pas de grands titres. Ils sont mis au chapitre des risques de la guerre. Les avions commerciaux non plus: risques du métier. Lorsque le Boeing cargo de la Varig parti du Japon le 30 janvier 1979 pour Rio a définitivement quitté les écrans radar, on a moins pleuré pour les six hommes d’équipage que pour les 153 tableaux du peintre nippo-brésilien Manabu Mabe qu’il transportait. Une quinzaine d’avions cargo ont disparu sans publicité depuis le milieu du siècle dernier. En 2003, on s’est inquiété du sort étrange d’un Boeing volé sur l’aéroport de Luanda par on ne sait qui, on ne sait pourquoi, mais toujours manquant. Les Etats-Unis ont soulevé l’hypothèse terroriste mais un brigandage économique n’est pas exclu. Les milieux concernés évitent le tam-tam qui mettrait en doute le sérieux de la sécurité. »

Des avions privés disparaissent aussi. Celui de Camilo Cienfuegos à Cuba en 1959, en pleine révolution, il est vrai. Sabotage ? Erreur humaine ?

La disparition rend fou. L’absence de traces et d’explication est une torture pour l’esprit. Pour se calmer, un lecteur du Temps affirme dans un mail privé qu’il «sait» ce qui est arrivé à l’avion de Malaysia Airlines et ses 239 passagers. Son intuition, hélas, ne soulage que lui.


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(1) Le Temps, 19 avril 2014

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