La gastronomie, c’est trivial, dit-on aux chercheurs en sciences sociales. Et pourtant, c’est de la géographie ! Je tombe sur le tout chaud Dictionnaire impertinent de la gastronomie de Périco Légasse qui sort de l’imprimerie. Journaliste impertinent à Marianne, Périco Légasse comme Onfray donne des boutons aux uns mais régale les autres.
Voici ce que la lettre « C » de son dictionnaire-poil-à-gratter déroule dans le menu (en dehors d’une dizaine de mots plus techniques ») : Cabillaud, Cacao, Café (boisson) (et endroit), Caillette ardéchoise, Camembert, Carpaccio, Cassoulet, Chapon, Charolais, Château (bordelais), Chinoise, Chorizo, Coca Cola, Comté, Couscous, Crapiau morvandiau, Curcuma, Curry.
Tous ces mots évoquent des lieux Et Périco Légasse rajoute une couche de géographie dès qu’il le peut : « Cassoulet. Couscous français. Plat emblématique du répertoire gastronomique français et fleuron de la tradition culinaire régionale, le cassoulet est né de la rencontre avec les Arabes et l’Amérique ». Certes, l’ancêtre du cassoulet, c’était un plat de fèves avec du lard (comme les fèves au lard du Québec). Mais pour Périco Légasse, les Arabes ont enrichi ce plat de fèves avec du mouton et l’Amérique avec des haricots. Enfin, le cassoulet s’est ouvert au canard. Si les Français aiment tant le couscous, c’est parce qu’il existe déjà dans une version française par le cassoulet.
Il y a beaucoup d’humeur, de coups de sang, des avis tranchants (« A point » : cuisson des végétariens refoulés ; « Étoilé » : restaurateur en sursis ; « Monsanto » : solution finale ; « This Hervé », docteur Folamour du topinambour déstructuré, « Yaourt » : poudre aux yeux pour moutons, etc.) . Mais Périco Légasse ne rigole pas avec les origines, avec les tricheries géographiques. Il n’aime pas l’entre-deux.
Et lorsque nous nous serons lassés des restaurants qui réchauffent des produits industriels, nous suivrons l’exotisme culinaire qu’il propose, après avoir « slalomé » entre pizzerias, kebab, chinois-vietnamiens-thaïlandais, couscous, japonais. Nos enfants iront chercher dans des contrées sauvages au milieu d’indigènes avec des mines patibulaires les forces de déguster un tourin sarladais, une caillette ardéchoise, une farcidure limousine, une pauchouse bressanne, un crapiau morvandiau, une garbure béarnaise, un grenier médocain, une beuchelle tourangelle, un pounti cantalou, un pithiviers poyaudin, des tripoux auvergnats, une piquenchâgne bourbonnaise, une flognarde limagnole et autres plats aux intitulés exotiques. « Ne pas confondre plats tropicaux et plats trop locaux ».
Un livre roboratif et jubilatoire.