Zero Dark Thirty, Kathryn Bigelow


Il y a une mode, inutile, insupportable, stupide, malhonnête, consistant à assommer le spectateur innocent, dès la première image, à l’aide de la grosse massue « faits réels ». C’est ce qu’ont longtemps fait de mauvais téléfilms de deuxième partie de soirée, c’est ce que font un nombre croissant de films s’autorisant ainsi à ne pas avoir d’avis et à laisser le spectateur s’en forger un, ce qu’une coupure de presse fait pourtant au moins aussi bien qu’un long-métrage deux heures. Les Cahiers du cinéma (n°684) ont trouvé à ce phénomène un joli nom : le syndrome Natasha Kampusch. Cette fois, c’est Kathryn Bigelow, réalisatrice en 2009 de l’excitant Démineurs, qui se livre au petit jeu du je-ne-suis-pas-là-pour-juger-moi-je-fais-juste-du-cinéma-pas-de-la-politique, avec Zero Dark Thirty.Le scénario, qui relate la traque de Ben Laden par la CIA et plus particulièrement par une espionne implacable et inoxydable – campée par Jessica Chastain toujours aussi belle et de plus en plus convaincante –, se cache donc derrière l’argument de la véracité, du factuel. Il montre patte blanche à l’aide d’un panneau : « ce qui suit est basé sur des témoignages de première main », revendiquant ainsi une objectivité qu’on sait pourtant tout à fait illusoire : des faits, certes, mais jamais tous les faits, jamais depuis tous les points de vue, et comment pourrait-il en être autrement ?

La première scène du film est emblématique du grand écart entre le talent de réalisatrice de Bigelow et son refus de penser le problème au-delà des faits-rien-que-les-faits. D’un côté, il y a la belle idée de ne pas utiliser les images cent fois ressassées du 11 septembre 2001 mais (la suite de cet article de Manouk Borzakian, géocinéphile, sur son blog  ici)


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