Rien ne vaut la nature pour s’étonner des humains. Dans le cas qui nous occupe, des chercheurs de l’université de Lausanne (Suisse) reviennent sur la politique de limitation des phosphores mise en place dans les années 1980 lorsqu’on accusait les lessiviers et les agriculteurs productivistes d’être responsables de l’eutrophisation des cours d’eau et des lacs. S’en était suivi un plan de déphosphoration qui a été si efficace que la situation inquiète la Fédération suisse de pêche : «La situation est dramatique dans le lac de Brienz (Oberland bernois) et bientôt dans d’autres plans d’eau suisses, dénonce Roland Seiler, président de la fédération sur le site Largeur. Durant les vingt dernières années, la concentration de phosphore a chuté massivement. Cela a causé la disparition des daphnies, des puces d’eau dont se nourrissent les poissons. Les captures de corégones par des professionnels se sont effondrées de 20 tonnes à 2 tonnes annuelles.»
Mais voici une arête dans le raisonnement : le Léman a perdu les trois-quart de son phosphore sans que le nombre des fritures et de la pêche en soit affecté.
Pour le lac Léman, les effets de la déphosphoration ont été salutaires: la quantité de phosphore est passée de 81 mg/l en 1981 à 22 mg/l en 2010. Cette évolution n’a pas engendré une baisse de la quantité de poissons pêchés dans le plus grand lac de Suisse. Au contraire: les prises annuelles moyennes ont augmenté et même dépassé les 1’000 tonnes en 2009. Selon les spécialistes, l’amélioration de la qualité de l’eau ces dernières décennies a favorisé le retour d’une plus grande biodiversité.
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Pour en savoir plus :
L’article de Largeur et Comment le phosphore asphyxie un lac
Une quantité importante de phosphate nuit à la biodiversité, rappelle Audrey Klein de la Cipel. «Elle crée un développement intempestif d’algues. Lorsqu’elles meurent, elles se décomposent et consomment de l’oxygène. Autrement dit, plus il y a d’algues, moins il y a d’oxygène, en particulier dans les eaux du fond, ce qui peut mener à l’asphyxie du lac. Ce manque d’oxygène — l’eutrophisation — met en péril l’existence des poissons et d’autres organismes vivants.»