Qui connaît l’Érythrée ? Et qui en parle ? Quand même, Asmara, la capitale, peut vous offrir de palper ce qu’est une ville italienne des années 1930 (le pays a été colonisé depuis 1890, puis administré par les États-Unis de 1941 à 1952). Cafés et « mochas », ces fameux espresso qu’on aime avec un soupçon de lait. La Rome de Rossellini et la Venise de Visconti, vous n’avez pas connu, alors, allez à Asmara !
Mais quelle hypocrisie, ce régime érythréen ! Il faut apprivoiser les autochtones pour leur arracher la vérité : contrôle des téléphones, interdiction de sortir du pays avant 50 ans (sic). Vous avez « perdu » votre ami ? Renseignez-vous à la prison. Et si vous pensez qu’on fait la queue devant les magasins parce qu’il y a trop de monde, détrompez-vous : c’est le rationnement ! Avec des tickets, comme pendant l’occupation allemande en France dans les années 1940
Vous voulez travailler ? Les hommes doivent un « service national » d’un an et demi, après obtention d’un diplôme, comme le raconte Aymeric, cité par Charlotte Velut (1), un « service » qui se prolonge ad vitam aeternam si vous n’avez pas de piston pour passer dans le privé. Une manière de contrôler la population, pour l’un des gouvernements les plus suspicieux. Avec 10 000 prisonniers politiques vivants selon Amnesty International (cité par C. Velut) dans des « conditions atroces, inimaginables » (rapport du 9 mai 2013), l’Érythrée est l’un des derniers pays pour la liberté de la presse, selon Reporter sans frontières. Même après la Corée du Nord, c’est dire.
Le président Issaias Afeworki se méfie de ses ministres, avocats, journaliste depuis une fronde d’académiciens. Plus de presse. Aucun humanitaire. Une répression que tout le monde semble ignorer. Depuis vingt ans (23 mai 1993), le Front de libération du peuple est au pouvoir depuis la fin de la guerre contre l’Éthiopie qui avait annexé le pays en 1962 et installé un régime communiste en supprimant la propriété privée.
Comme dans le bloc soviétique, les femmes ne sont pas inaudibles, loin de là. On les trouve dans l’armée et à des postes de commande qui ne sont pas monnaie courante dans la région. Les femmes comme les hommes ont été rebelles dans une guerre civile qui a duré pendant la « colonisation » éthiopienne jusqu’en 1991. Aidé par la communauté internationale qui a salué son indépendance en mai 1993, le pays a sombré dans la folie. Jusqu’à mener une deuxième guerre contre l’Éthiopie en 1998-2000 pour une histoire d’îlot à récupérer. En fait, un prétexte pour souder le pays contre un ennemi imaginaire.
L’avenir ? Quitter le pays, pour sortir de cette chape de plomb, quitte à aller chez le voisin pourtant très pauvre, le Soudan.
Aujourd’hui, la porte est ouverte si vous avez 4000 euros et si vous échappez au filet de la police des frontières qui vous jette en prison. Une menace qui n’effraie pas les 1800 Érythréens qui arrivent à passer chaque mois….
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(1) Excellent article, La Croix, 13 mai 2013
Une réponse à “Pays oublié (1) : l’Érythrée, pays cadenassé”
J’ai beaucoup entendu parlé de l’Erytrée lors de deux visites en Ethiopie par le guide qui nous accompagnait . C’est « l’ennemi permanent »; la peur d’un conflit armé est omniprésente .Les éthiopiens ne » digérent « pas de ne pas avoir d’accés à la mer .Régulièrement dans le Danakil des attaques (sur des touristes )ont lieu .D’ou viennent ils :Somalie ?Erytrée ?