Tout le monde a en tête les manifestations en Bretagne qui prennent des allures de fronde fiscale. Mais l’écotaxe incriminée, en réalité une taxe poids-lourds, est vraiment l’arbre qui cache la forêt.
En effet, cette taxe, dont tout le monde s’accorde pour dire que c’est une bonne idée qui arrive au pire moment, est censée avoir pour but d’obliger le trafic des marchandises à se recentrer sur d’autres types de transport moins polluants. Mais est-ce une mesure suffisante? De toute évidence, non. Elle est cosmétique, tout au plus.
Quand l’on songe aux nuisances engendrées par les transports routiers, en terme de danger, d’accidents, et de pollutions diverses, on imagine mal en même temps faire reculer un groupe de pression aussi disparate que puissant. C’est paradoxal puisque les conditions de travail des routards sont déplorables.
Le transport routier est devenu le moyen de transport par excellence des marchandises, mais ce n’est pas une fatalité. Le rail et l’eau devraient être les modes de transport majoritaires, car peu de denrées finalement nécessitent réellement un transport rapide. Mais la situation actuelle est très éloignée de ce constat. Le diagramme ci-contre met bien en évidence la montée en puissance de la route par rapport au reste.
Tout ceci procède de choix de société qui n’ont pas été faits ou plutôt ont été mal faits. Bien entendu, il existe des situations régionales très contrastées en France, mais la logique purement industrielle dans le transport de marchandises oblitère le débat.
Pendant toute la période médiévale, tous les cours d’eau connaissaient un trafic intense, et on y transportait beaucoup de choses. Mais c’était des unités de petite taille. Autrement dit, pour vraiment réutiliser ces réseaux, il faudrait redescendre de plusieurs crans dans la taille des embarcations. Imaginer des transports très décentralisés, et des bateliers bien organisés.Cela engendrerait un système économique totalement différent du système actuel.
Il faudrait ensuite imaginer des plateformes d’échanges « multimodales » elles-mêmes de petite taille pour les échanges régionaux ou locaux. Cela permettrait un redéploiement économique fondé sur des bases locales. Une utopie?
A vrai dire, le même raisonnement est transposable dans le domaine de l’énergie, où l’on pourrait imaginer de petites unités de productions décentralisées. Cela demande une fois de plus une remise à plat générale de l’organisation de la production. Nous n’en sommes manifestement pas là, et c’est fort dommage.
Tout cela révèle une France bien peu écologique, et tous les ministres de l’écologie qui se sont succédé à ce poste depuis qu’ils existent ont presque toujours été muselés par le ministère de l’économie et de finances. Triste constatation et aveu de faiblesse. Espérons que cela change un jour.