Faut-il réouvrir le zoo de Vincennes ?


Le biodôme tropical du zoo

A l’époque où les animaux n’ont jamais été aussi proches de l’homme, notamment par les images envahissantes, les gadgets et autres systèmes de compagnie, on se pose une question qui fâche: à quoi servent les zoos ? Oui, comme tous les parents, j’ai aimé emmener mes enfants zyeuter les girafes et les lions, se faire peur avec les crocos et les iguanes, singer les babouins et photographier les papillons. Mais c’était une autre époque. Pour connaître les tigres, à notre époque, il n’y avait que la Piste aux étoiles à la télévision et les livres de l’Ecole des loisirs, Mickey Mouse et Babar.

Désormais que les chercheurs s’interrogent sur l’animalité, que Vinciane Despret montre que la chasse est un « rituel pour approcher un mystère plus grand que soi« , qu’on apprécie les animaux pour leur esthétique (Adolf Portmann, La forme animale), parce qu’il y a, pour Tristan Garcia, une « communauté des vivants« , enfermer les animaux pour les montrer a-t-il encore du sens ? Le géographe Jean Estebanez a travaillé sur ces thèmes. Non loin de l’université Paris-12 où il enseigne aujourd’hui, le zoo de Vincennes rouvre mais s’est posé la question et y a répondu…

Familles du dimanche et touristes, rassurez-vous, il y aura bien des girafes, des zèbres, des rhinocéros et des autruches, mais les gibbons, les tigres, les hippopotames, les éléphants et  les ours sont partis et cèdent la place aux lamantins, lynx, fossas, loups d’Espagne et gloutons.

Fermé depuis 2008, le zoo fait peau neuve autour du célèbre rocher du Bois de Vincennes qui sert de boussole aux promeneurs. Cet ancien parc de la Porte Dorée (12e) avait ouvert en 1934. Vétuste, il a été réaménagé par le Muséum d’Histoire naturelle qui gère l’endroit. Mais changement radical : on passe d’un animal au statut de curiosité dans de beaux décors, à des animaux intégrés au concept de biodiversité. Comme à Montréal et dans beaucoup de parcs nord-américains, le zoo est désormais divisé en cinq « biomes » : Europe, Sahel-Soudan, Guyane, Madagascar et Patagonie. Voici ce qui a été concocté par le Museum :

– Une biozone Sahel-Soudan
4 milieux : savane arborée, savane arbustive, savane rase et delta ;
44 espèces dont la girafe d’Afrique de l’Ouest (Giraffa camelopardalis), le rhinocéros blanc (Ceratotherium simum), l’autruche (Struthio camelus), le babouin de Guinée (Papio papio), l’oryx algazelle (Oryx dammah), le grand koudou (Tragelaphus strepsiceros) et l’addax (Addax nasomaculatus).
– une biozone Patagonie
3 milieux : pampa, côtes rocheuses et forêt andine ; 7 espèces dont l’otarie à crinière (Otaria byronia), le manchot de Humbolt (Spheniscus humboldti) et le puma (Puma concolor). Biozone Europe 4 milieux : forêt de conifères et garrigue, marais et montagne froide ;
28 espèces dont le loup d’Ibérie (Canis lupus signatus), le lynx boréal (Lynx lynx), des vautours et de nombreux reptiles et amphibiens.
– une biozone Amazonie-Guyane
Un milieu, décliné en plusieurs habitats : forêt équatoriale, crique et milieu fluvial ;
67 espèces dont le caïman nain (Paleosuchus palpebrosus), le lamantin (Trichetus sp.), l’ara hyacinthe (Anodorhynchus hyacinthinus), l’anaconda (Eunectes sp.) et de nombreux petits primates…
– et une biozone malgache
2 milieux : forêt humide et forêt sèche ;
30 espèces dont des lémuriens, le fossa (Cryptoprocta ferox) et la tortue rayonnée (Astrochelys radiata).

On n’énumèrera pas les nouveautés, mais on apprécie la plus grande végétalisation du parc, les volières dont une de flamants roses et une d’oiseaux en liberté. Comme au Muséum, la serre tropicale chauffée à 25°C permet de connaître l’écosystème guyanais où évoluent perroquets et… paresseux en liberté. Mais dans le regard triste des lamantins qui remplacent les gibbons dont on a estimé qu’ils n’avaient plus rien à faire dans un cage, vous pourrez vous poser encore une fois la question. L’idéal n’eût-il pas été, comme en Amérique, d’enfermer les visiteurs dans des cages mobiles (vive les petits trains !) circulant dans une arche de Noé rappelant le bon temps du paradis perdu ?

En attendant, c’est peut-être là que « le surgissement d’un animal [rejouera pour vous] la création du monde » (Yannick Haenel).

 

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Parc zoologique de Paris. Ouvert à partir du 12 avril. Entrée : angle de l’avenue Daumesnil et de la route de Ceinture du lac Daumesnil (XIIe). Tél. 01.40.79.31.25. Billeterie déjà ouverte sur Parczoologiquedeparis.fr.

Signalons l’excellent « Pourquoi aimons-nous les animaux », Philosophie Magazine, mars 2014.

 

 

 

Biozone Sahel-Soudan
4 milieux : savane arborée, savane arbustive, savane rase et delta ;
44 espèces dont la girafe d’Afrique de l’Ouest (Giraffa camelopardalis), le rhinocéros blanc (Ceratotherium simum), l’autruche (Struthio camelus), le babouin de Guinée (Papio papio), l’oryx algazelle (Oryx dammah), le grand koudou (Tragelaphus strepsiceros) et l’addax (Addax nasomaculatus).

Biozone Patagonie
3 milieux : pampa, côtes rocheuses et forêt andine ;
7 espèces dont l’otarie à crinière (Otaria byronia), le manchot de Humbolt (Spheniscus humboldti) et le puma (Puma concolor).

Biozone Europe
4 milieux : forêt de conifères et garrigue, marais et montagne froide ;
28 espèces dont le loup d’Ibérie (Canis lupus signatus), le lynx boréal (Lynx lynx), des vautours et de nombreux reptiles et amphibiens.

Biozone Amazonie-Guyane
Un milieu, décliné en plusieurs habitats : forêt équatoriale, crique et milieu fluvial ;
67 espèces dont le caïman nain (Paleosuchus palpebrosus), le lamantin (Trichetus sp.), l’ara hyacinthe (Anodorhynchus hyacinthinus), l’anaconda (Eunectes sp.) et de nombreux petits primates…

Biozone Madagascar
2 milieux : forêt humide et forêt sèche ;
30 espèces dont des lémuriens, le fossa (Cryptoprocta ferox) et la tortue rayonnée (Astrochelys radiata).


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