Patate ou noix de cajou? C’est ce qu’évoque la forme de l’astéroïde choisi pour les explorations de la sonde Rosetta, baptisée du nom de la « pierre de Rosette », déchiffrée par Champollion et qui permit de comprendre, enfin, les hiéroglyphes égyptiens. Ce petit satellite de l’agence spatiale européenne (ESA), envoyé en 2004 vers l’astéroïde 67P/Tchourioumov-Guérassimenko (un nom facile à retenir), a donc commencé à remplir sa mission en envoyant la sonde Philae sur la surface de l’astéroïde le 12 novembre dernier. Et les photographies envoyées, comme les analyses, ont commencé à apporter leur lot de surprises et de faits nouveaux que les équipes de scientifiques ont commencé à décrypter.
La géographie physique s’est intéressée, et s’intéresse encore, aux exoplanètes et aux planètes du système solaire, car ces corps « telluriques » ou pas, permettent de mieux comprendre comment fonctionne notre propre planète. Au-delà de la prouesse technique et scientifique (plus de 6 milliards de kilomètres parcourus par le satellite, 10 ans d’attente, etc.) on retrouve une étrange familiarité dans les descriptions de l’astéroïde: on parle de bassin, d’éboulis, de pentes, tout comme on le ferait pour notre bonne vieille planète, sauf que cela concerne un corps céleste très, très éloigné du nôtre… Comme le déclare Philippe Lamy au Monde : « (…) l’état de surface est une très grosse surprise. Nous avons essentiellement deux types de terrains : des zones relativement étendues qui ressemblent presque à des dunes, probablement un gravier beaucoup plus gros ; et d’un autre côté des surfaces type rocheuses très dégradées, avec des éboulis, des rochers dispersés, des bassins en partie effondrés. C’est une très grosse surprise par rapport aux autres noyaux cométaires qui ont été visités dans des missions spatiales passées. »
Le Monde propose une série de photos de l’astéroïde ici.
Alors que la période de la Guerre froide fut plus que faste pour l’exploration spatiale en raison de la concurrence effrénée entre USA et URSS, sa fin a vu aussi la chute de nombre de programmes scientifiques d’exploration. Que s’est-il passé? La Terre a été comme rattrapée par ses propres problèmes et l’exploration de l’espace intersidéral est apparu comme un luxe coûteux et inutile. La science fiction s’en est aussi pris un coup au passage. Les dystopies et autres univers cyberpunks ont pris le dessus. L’espace ne faisait plus rêver… Et la prise de conscience des problèmes environnementaux a sérieusement remis en cause le bien-fondé de ces programmes scientifiques.
Rosetta relance un peu le rêve en nous projetant à des millions de kilomètres de la terre, dans le silence et le froid du grand espace. Et les photos arrivent, dans un noir et blanc sidérant par leur précision. On espère comprendre, grâce à l’analyse de ce bout de glace, les premiers temps de la Terre et du système solaire. Un retour aux origines matérielles de la terre à travers un voyage futuriste. Beau paradoxe, qui en retour nous permet de mieux comprendre notre propre histoire naturelle…