L’Inde si pauvre et, pourtant, gavée d’or


Ils ont bonne mine ceux qui plaident la « rationalité économique » des comportements humains. Voici l’Inde, où dorment des tonnes d’or, et qui ne nourrit pas sa population. Derrière et sous les temples que nous faisons mine de visiter en prenant quelques photos, des chambres fortes renferment tout l’or du monde, bijoux, monnaies, statuettes que vous voudriez avoir pour donner aux « pauvres ». On dit que ces lieux sont gardés par des serpents et qu’on en a parfois perdu le code d’accès.

Comment le sait-on ? Par un jugement du tribunal du Kerala datant de 2011 enjoignant le temple de Sree Padmanabhawamy (photo ci-dessus) d’en forcer les portes, selon le romancier et journaliste Anthony Bellanger (1). Les flics en eurent pour leur bravoure : de la poudre d’or en sac, des bijoux incrustés de pierres précieuses, des statuettes de dieux et déesses, le tout estimé à quinze milliards d’euros.

Ce trésor était bien gardé par des serpents forcément venimeux, pour coller à une légende « digne d’Indiana Jones ». D’où vient cet or ? De dons faits à des divinités qui ne peuvent être faits qu’avec du métal précieux, or et argent, voire des pierres rares. Les Indiens aiment tant l’or qu’ils en achètent environ mille tonnes par an. Juste derrière la Chine. Un poste d’importation presqu’aussi important que le pétrole.

« Une addiction qui coûte cher : il y a deux ans, l’once d’or a atteint des sommets et le métal compte pour un tiers du déficit commercial ». La Banque centrale en capitalise 500 tonnes, les particuliers vingt-deux mille, dont deux milles pour les temples déjà très riches… Leur fortune serait évaluée à plus de mille milliards d’euros.

Temple Trumala Trupati Davasthanams
Tempe Trumala Trupati Davasthanams (Andra Pradesh)

Un trésor pour rien ? Qui ne peut être basculé dans la sphère monétaire ? Investi ? Le trésor des temples appartient aux… dieux ! Formés en Europe, les dirigeants ne parviennent pas vraiment à siphonner une partie de cette richesse. Même quand ils proposent un dépôt bancaire avec versement des intérêts versés en or, comme cela s’est fait au temple Trumala Trupati Davasthanams  (photo ci-contre). « Transformer l’or des dieux en roupies décomptées par des banquiers intouchables : sacrilège ! »

Pourtant, croulant sous l’or, des temples organisent des enchères de bijoux, pierres et or. Gagnantes à tous les coups, puisque ces bijoux, pierres et or sont bénis des dieux !

En mai 2015, le pieux Premier ministre Narendra Modi a voulu lancer un plan national pour tenter de réveiller cet or dormant. Pour l’instant, sans grand succès. Au secours, les économistes !

___________

(1) « En Inde dorment des tonnes d’or », Marianne, 21 mai 2015


2 réponses à “L’Inde si pauvre et, pourtant, gavée d’or”

  1. La nouvelle invasion Aryenne future permettra peut-être d’ici quelque millénaire – il convient de laisser le soin au temps de faire son oeuvre – de mettre fin à l’idolâtrie populaire ?? Pour l’instant, les moeurs demeurent ce qu’elles étaient il y a 4 000 ans …

  2. Un tableau contrasté de l’Inde nous est livré, à l’instar de la réalité économique et sociologique de cet état fédéral. Ce n’est pas le seul pays à détenir de telles quantités d’or, pour ne pas dire réserves. Les Etats-Unis, la Russie en détiennent énormément, sous forme de lingots ou de réserves minières, exploitées ou non, la Chine achète de l’or en quantité: cet or est-il destiné à la fabrication des écrans de nos tablettes et autres Iphones? J’en doute. Assiste-t-on au retour de la parité $ / Au ? Bien sûr je caricature. Au fait, lorsqu’on admire la sainte Chapelle, le dôme des Invalides, et bien plus le Vatican, et divers trésors iraniens, mexicains,égyptiens, a-t-on le réflexe de penser à un usage philanthropique de tous ces trésors entassés, exposés ou non aux yeux des visiteurs? Je ne le crois pas, pas plus à Quito où la misère est grande, qu’à Madrid qui va vivre les chamboulements liés au vote des indépendantistes catalans mais ceci est une autre histoire.
    Bien plus que cet amas de richesses inertes, improductives, c’est l’organisation sociale de l’Inde en castes, citée dans l’article, qui me choque, moins prégnante dans les grandes métropoles qu’en milieu rural certes, mais toujours présente, tenace,désespérante. Et bien plus encore la place qui est faite aux femmes, lorsqu’elles parviennent à naître, à grandir, à manger donc et à préserver leur intégrité physique et mentale.
    Et puis l’or, ce n’est pas Blaise Cendrars qui me contredira, est une chimère, de l’Eldorado à la Kolyma…
    Il est bien tard, je veille car c’est la nuit de la lune rousse, je ne voudrais pas manquer ça pour tout l’or du monde! Apercevoir l’ombre projetée de la Terre sur la Lune à l’oeil nu ça n’a pas de prix.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.