Enfin ! La révolution a, enfin, lieu en Tunisie. Quinze mois nous séparent de ces soubresauts qui virent le régime tunisien comme celui de Louis XVI en 1789, chanceler. Quinze mois très précieux pour accoucher de cette fameuse « liberté de conscience » qui place la Tunisie comme le premier pays arabe à accepter que des hommes et des femmes puissent être libre de leur conscience. Sans référence à l’Islam ou quoi que ce soit. Une ré-vo-lu-tion !
On pourra, en Tunisie, changer de religion, ou se déclarer a-religieux. Impensable dans le monde musulman où tout celui qui renie l’Islam est un apostat, un être menacé de mort par des islamistes radicaux.
La majorité des pays de la région qui sont « arabes » (exceptés pays du Golfe et Maroc avec son roi, commandeur des croyants) adoptaient, de fait, l’idée que tous les citoyens (hors les Juifs) sont citoyens arabes et chrétiens de naissance, sans changement possible de religion.
Les Tunisiens sont passés par-dessus ces considérations pour adopter ce qu’on appelle en Occident, la « modernité ». Non sans mal ni interruption de séance pendant que siégeait l’Assemblée constituante. Non seulement, il y a liberté de conscience, mais dans la nouvelle constitution tunisienne, il n’y a aucune référence à la charia. Ce qu’avait déjà adopté Ennahda, le parti au pouvoir depuis 2011. Mieux : on reprend la Constitution de 1959 : l’article 1 qui précise que « La Tunisie est un État libre, indépendant et souverain. L’islam est sa religion, l’arabe sa langue et la République son régime. »
Tous les députés présents – moins trois – ont voté oui, en indiquant que cet article ne peut être amendé. Mieux, l’article 2, non amendable aussi, prévoit l’instauration d’ »un État à caractère civil, basé sur la citoyenneté, la volonté du peuple et la primauté du droit« . Les amendements proposant l’islam comme « source principale de la législation » ont donc été rejetés par l’Assemblée.
Il y a toutefois un compromis avec le parti islamiste : l’Etat protège le « sacré », il et le « gardien de la religion » (art. 6). Comme à l’époque de Bourguiba. La période de transition depuis le départ de Ben Ali il y a exactement deux ans (le 14 janvier 2011) va s’achever sans doute par le vote d’une loi fondamentale pour établir une nouvelle République.
Une révolution, on vous dit. Notez bien janvier 2014 dans vos souvenirs, c’est août 1789 en Tunisie.